Environ 15 % ¹ de toutes les infections sont causées par des champignons, et les infections fongiques invasives sont une cause de plus en plus fréquente de septicémie, en particulier chez les patients gravement malades. L’impact des infections fongiques confirme l’importance de la recherche sur les modes d’infection des humains par les champignons, et sur la manière dont ces infections peuvent être détectées, identifiées et traitées.
Les espèces de Candida sont de loin la cause prédominante de septicémie fongique, représentant environ 5 % de tous les cas de septicémie ¹ . Les infections invasives à Candida sont associées à un taux de mortalité élevé ¹. Il est essentiel de diagnostiquer rapidement une candidose invasive afin d’instaurer rapidement un traitement antifongique. Selon les auteurs de Invasive Candidiasis as a Cause of Sepsis in the Critically Ill Patient (La candidose invasive comme cause de septicémie chez les patients gravement malades), plusieurs études ont montré qu’un traitement inapproprié ou des retards dans l’introduction d’antifongiques appropriés sont associés à une augmentation de la mortalité chez les patients atteints de candidémie (une infection sanguine à Candida) ou de choc septique dû à Candida.
En janvier, le Centre de recherche et de politiques sur les maladies infectieuses de l’université du Minnesota (Center for Infectious Disease Research and Policy, CIDRAP) ² a rapporté que le CDC a découvert trois cas de C. auris pan-résistant à New York, et a déclaré que les échantillons des trois patients étaient résistants aux trois classes d’antifongiques couramment prescrits — flucanazole, amphotéricine B et échinocandines. De plus, la résistance aux échinocandines n’a été détectée qu’après que les patients aient commencé à recevoir les médicaments, ce qui, selon les auteurs, indique que la résistance est probablement apparue pendant le traitement. Les trois patients sont décédés, bien que le décès de l’un d’entre eux ait été causé par des conditions médicales sous-jacentes. Les recherches récentes pourraient contribuer à améliorer les moyens d’identifier et de traiter les champignons multirésistants, dont Candida auris et d’autres.
Étude de la réponse immunitaire des patients contre Candida Auris
Candida auris ³ est considéré comme l’une des infections fongiques les plus importantes car il est souvent multirésistant aux antifongiques et il peut être difficile à identifier. Une étude ⁴ publiée en août 2020 s’est attachée à découvrir les mécanismes de défense innés contre C. auris, dans l’espoir de mieux comprendre comment le champignon s’implante dans notre organisme. Les chercheurs ont pu déterminer comment notre système immunitaire réagit à C. auris par rapport à d’autres souches de Candida, comme Candida albicans. Collectivement, les résultats de l’étude démontrent que C. auris est un puissant inducteur de la défense innée de l’hôte et identifient des cibles possibles pour une immunothérapie adjuvante. Comme les infections fongiques sont souvent opportunistes et surviennent chez des patients dont le système immunitaire est déjà compromis, il existe un grand intérêt ⁵ de fait de stimuler la réponse immunitaire du patient comme moyen pour atténuer l’infection.
Comment Cryptococcus neoformans s’adapte pour survivre dans le corps humain ?
Outre les espèces de Candida, d’autres types d’infections fongiques peuvent également devenir invasives, notamment chez les patients dont le système immunitaire est affaibli ou qui présentent d’autres problèmes de santé sous-jacents. Cryptococcus neoformans, qui infecte les poumons et peut ensuite se propager à d’autres parties du corps, cause 1,6 million de décès dans le monde chaque année.
Plus précisément, ce champignon peut provoquer une méningite potentiellement mortelle, le plus souvent chez les personnes immunodéprimées. Une étude de 2019 de l’Institut de recherche médicale de Westmead (Westmead Institute for Medical Research) ⁶ a identifié comment cette grave infection fongique peut se développer chez l’homme en conservant le phosphate. En effet Cryptococcus neoformans a besoin de phosphate pour se développer et entretenir une infection chez son hôte. Les chercheurs ont observé ⁷ que dans les environnements où le phosphate est limité, Cryptococcus neoformans remodèle les lipides – les acides gras de la membrane cellulaire – pour libérer le phosphate. Une meilleure compréhension de la manière dont ce champignon s’adapte et survit peut servir de base à des recherches plus poussées sur les moyens d’empêcher ce processus de se produire et de ralentir ou d’arrêter la propagation de l’infection.
Opportunités et défis pour améliorer le diagnostic des infections fongiques
Bien que les techniques de culture microbienne et de microscopie soient considérées comme la référence du diagnostic des infections fongiques invasives, il est nécessaire d’accroître la rapidité, la sensibilité et la spécificité. Un récent article ⁸ portant sur les techniques de détection et d’identification, publiée dans Frontiers in Microbiology, examine l’utilité et les défis de la détection directe dans les prélèvements cliniques, de l’identification et de la caractérisation basées sur le génome, et de la détection moléculaire de la résistance aux antifongiques.
Les auteurs de l’article remarquent que la gestion de la pathologie et du diagnostic est un domaine qui mérite d’être pris en considération lors de la mise en œuvre de nouvelles technologies. En définitive, il convient de prendre en considération la capacité des laboratoires à adopter les technologies, à établir des protocoles d’utilisation et des méthodes d’interprétation, et à réaliser une analyse de la rentabilité en fonction des bénéfices. Si elle est effectuée correctement, la mise en œuvre de nouvelles technologies peut à la fois réduire les coûts et améliorer les résultats pour les patients. Les auteurs concluent que grâce aux codes-barres ADN de haut niveau, aux technologies NGS et aux approches métagénomiques, la vision d’un « guichet unique » pour les infections fongiques semble être à portée de main dans un avenir proche.
Les opinions exprimées dans cet article ne sont pas nécessairement celles de bioMérieux.
Sources :
¹ Invasive candidiasis as a cause of sepsis in the critically ill patient, PubMed Central® (PMC) (https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3916370/)
² Three cases of worrisome pan-resistant C auris found in New York, Center for Infectious Disease Research and Policy (CIDRAP) (https://www.cidrap.umn.edu/news-perspective/2020/01/three-cases-worrisome-pan-resistant-c-auris-found-new-york)
³ Candida auris, Centers for Disease Control and Prevention (https://www.cdc.gov/fungal/candida-auris/index.html)
⁴ Transcriptional and functional insights into the host immune response against the emerging fungal pathogen Candida auris, Nature Microbiology (https://www.nature.com/articles/s41564-020-0780-3)
⁵ Immunomodulation as Therapy for Fungal Infection: Are We Closer?, PubMed Central® (PMC) (https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC6068232/)
⁶ The PHO signaling pathway directs lipid remodeling in Cryptococcus neoformans via DGTS synthase to recycle phosphate during phosphate deficiency, Westmead Institute for Medical Research (https://journals.plos.org/plosone/articleid=10.1371/journal.pone.0212651)
⁷ New research uncovers how life-threatening fungal diseases adapt to survive in humans, Westmead Institute for Medical Research (https://www.sciencedaily.com/releases/2019/05/190506093607.htm)
⁸ A New Age in Molecular Diagnostics for Invasive Fungal Disease: Are We Ready?, Frontiers in Microbiology (https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fmicb.2019.02903/full)