Le 2 octobre 2019, dans le cadre du 15e congrès national de la Société Française de Microbiologie, le Dr Gauthier PÉAN DE PONFILLY, médecin biologiste, Assistant Spécialiste au laboratoire de Bactériologie de l’Hôpital Lariboisière à Paris, a présenté les résultats d’une étude comparative montrant les bénéfices de l’intégration du système BACT/ALERT® VIRTUO® dans son laboratoire.

La prise en charge du sepsis est un enjeu majeur de santé publique

Les hémocultures sont nécessaires pour faire face aux épisodes septiques. Les recommandations indiquent de faire au moins 2 paires d’hémoculture avant la réalisation d’une antibiothérapie probabiliste
La mortalité liée au sepsis, dont le taux est compris 15 et 30%, demeure toujours élevée. (Goto et al., Overall burden of bloodstream infection and nosocomial bloodstream infection in North America and Europe. Clin Microbiol Infect 2013). Cette prise en charge repose principalement sur la mise en place rapide d’une antibiothérapie adéquate, ciblant le pathogène en cause, et adaptée à son phénotype de résistance. Une étude souvent citée datant de 2006 (Kumar et al., Duration of hypotension before initiation of effective antimicrobial therapy is the critical determinant of survival in human septic shock. Crit Care Med 2006) a montré une augmentation de la mortalité de 7% par heure de délai supplémentaire de mise en place d’une antibiothérapie adaptée. Une antibiothérapie ciblée a également un impact sur la résistance (Lee et al., Strategies to Minimize Antibiotic Resistance. Int J Environ Res Public Health. 2013). Des recommandations ont été publiées aux États Unis en 2013 sur la prise en charge du sepsis (Dellinger et al., Surviving sepsis campaign: international guidelines for management of severe sepsis and septic shock. Crit Care Med. 2013). Elles préconisent le prélèvement d’au moins deux hémocultures avant la mise en place d’une antibiothérapie probabiliste, ce qui, d’un point de vue microbiologique, est quelque peu frustrant.

Le système BACT/ALERT® VIRTUO®

Le système BACT/ALERT® VIRTUO® permet de réagir plus rapidement face aux épisodes septiques (*)

Depuis plusieurs décennies, des automates sont dédiés à la prise en charge et à l’incubation des hémocultures. Le volume de ces prélèvements a tendance à augmenter dans nos laboratoires. Les opérations de chargement et de déchargement de ces instruments sont chronophages pour les équipes techniques. De plus, ce travail est peu gratifiant du fait qu’en moyenne, 90 % des hémocultures vont s’avérer négatives. Le système BACT/ALERT® VIRTUO® permet un chargement et un déchargement automatique des flacons. A la fin d’une période d’incubation de 5 jours, les flacons négatifs sont directement déversés dans le conteneur de déchets, sans ouverture de l’automate, sans conséquence sur la température d’incubation dont la stabilité est ainsi préservée.

Le volume de sang prélevé est un paramètre central impactant la sensibilité de l’hémoculture

Le BACT/ALERT® VIRTUO® innove par la mesure automatique du volume de sang prélevé. Un volume suffisant doit être prélevé en cas de suspicion d’épisode : de 40 à 60 mL, répartis entre 4 à 6 flacons. Une action immédiate peut être décidée en cas d’insuffisance de volume. De nouveaux indicateurs de qualité peuvent être mis en place pour un meilleur suivi des bonnes pratiques de prélèvement.

De nouveaux flacons pour une meilleure restitution du volume en phase avec les standards d’utilisation

Chaque flacon dispose d’une marque de niveau optimal de remplissage, utile aux équipes en charge du prélèvement. Ils sont également marqués d’un QR code renseignant l’automate sur la date de péremption et le numéro de lot des flacons. Ces paramètres sont enregistrés dans le dossier biologique pour répondre aux exigences de traçabilité de la norme NF EN ISO 15189.

Une sécurité et une traçabilité optimale grâce à une caméra « paramétrable »

Une caméra détecte le niveau de remplissage du flacon et ainsi le volume précis de sang introduit. Une photographie à 360° du flacon est réalisée, permettant d’observer le flacon a posteriori. Une présence excessive de mousse détectée impliquera une réévaluation automatique du volume de l’échantillon après 2 heures d’incubation. L’utilisateur peut paramétrer les limites hautes et basses du volume admis. Des alertes sur le niveau de remplissage peuvent être intégrées au compte rendu pour une meilleure information des cliniciens.

Une nouvelle génération d’automate d’hémoculture disposant d’algorithmes de détection embarqués pour une sensibilité et une spécificité améliorées (*)

Le principe de détection du BACT/ALERT® VIRTUO® est identique à celui des automates de la génération précédente, à savoir le BACT/ALERT® 3D. Les micro-organismes poussent dans le milieu et produisent du CO2 qui abaisse le pH. L’acidification fait évoluer du gris vers le jaune un indicateur colorimétrique présent sur le culot des flacons : le Sensor. Le changement de couleur est définitif. Il est mesuré par réflectométrie toutes les 10 minutes. Un nouvel algorithme de détection est embarqué sur le BACT/ALERT® VIRTUO®. Il mesure, en phase exponentielle, la variation significative de l’aire sous la courbe entre deux intervalles de 7 mesures, soit durant 1h10. Son interdépendance avec l’algorithme mesurant la variation de lecture à lecture permet de diminuer le risque de faux positifs. En cas d’hémoculture chargée tardivement, qui aurait potentiellement commencé une croissance en dehors de l’automate, un algorithme de mesure de réflectances élevées successives va permettre de déclencher un signal positif.

Dr Gauthier PÉAN DE PONFILLY et Samuel TESSON, congrès SFM 2019

Impact du nouvel automate sur l’organisation du laboratoire, l’épidémiologie et la prise en charge des prélèvements

Le BACT/ALERT® VIRTUO® a permis une augmentation significative du nombre d’épisodes bactériémiques

En 2015-2016, le laboratoire était équipé de plusieurs automates BACT/ALERT® 3D avec un chargement et un déchargement des flacons positifs qui avait lieu de 8h30 à 18h30, 7 jours sur 7. En 2017-2018, l’installation de deux BACT/ALERT® VIRTUO®, dont un délocalisé au laboratoire de garde, a permis un chargement des échantillons 24h/24, 7 jours sur 7. Entre les deux périodes concernées (2015-2016 d’une part et 2017-2018 d’autre part), il a fallu tout d’abord vérifier la comparabilité des pratiques de prélèvements. Le volume total d’hémocultures prélevées était quasiment identique. Constituant un peu plus du tiers du volume global, le nombre d’hémocultures solitaires (définies par une hémoculture isolée sans aucune hémoculture prélevée 24 heures avant ni 24 heures après) était également identique. L’augmentation des hémocultures positives entre les deux périodes a été significative : 2800 sur la période des BACT/ALERT® 3D, 3300 sur la période des BACT/ALERT® VIRTUO®. Le nombre d’hémocultures contaminées, qui constituait un tiers des hémocultures positives, a augmenté en proportion. Le nombre d’épisodes bactériémiques diagnostiqués a également été significativement plus important, passant de 1000 à 1200 épisodes.

Une réduction considérable du délai médian de chargement

En atteignant 57 % du volume global des hémocultures, le nombre d’hémocultures chargées sur les BACT/ALERT® VIRTUO® durant la garde, entre 18h30 et 7h, a très significativement progressé. Cette augmentation met en évidence l’importance de traiter les hémocultures 24h/24, surtout la nuit. Globalement, le délai médian de chargement a considérablement diminué, en passant de 7 heures à 1h30. Pour la seule période de garde, la réduction est encore plus forte, passant de 11 heures à un peu plus d’1 heure.

Le BACT/ALERT® VIRTUO® diminue les temps d’incubation et diminue le risque de faux négatifs, notamment en période de garde

Le gain de positivité entre les deux périodes est établi, quel que soit le type de flacon, aérobie ou anaérobie. Sur l’ensemble des prélèvements, le taux moyen de positivité était de 9 % en 2015-2016. Avec le BACT/ALERT® VIRTUO®, le gain est de presque 2 %. Le pourcentage de positivité progresse de manière très importante sur les hémocultures chargées en période de garde. Cette observation conforte le constat de deux publications montrant qu’un retard d’incubation augmente le risque de faux négatifs (Sautter et al., Effects of delayed-entry conditions on the recovery and detection of microorganisms from BacT/ALERT and BACTEC blood culture bottles. J Clin Microb 2006 – Lee et al., Growth dynamics of Staphylococcus aureus, Escherichia coli, and Pseudomonas aeruginosa as a function of time to detection in BacT/alert 3D blood culture bottles with various preincubation conditions. Ann Lab Med. 2013).

Une augmentation du nombre d’épisodes septiques diagnostiqués notamment en service d’urgence

Le gain d’environ 200 épisodes entre les deux périodes comparées est principalement constaté sur les hémocultures prélevées dans deux départements : Urgences et Médecine. Concernant les Urgences, plus de la moitié des épisodes sont diagnostiqués durant la période de garde. Sans surprise, on retrouve les trois grands groupes de pathogènes dans plus de la moitié des cas : E. coli, S. aureus et entérobactéries, suivis par d’autres épisodes polymicrobiens et des staphylocoques à coagulase négative (SCN) en cinquième position.

Une réduction des délais de prise en charge avec un gain médian de 3 heures

Pour tous les groupes de pathogènes, nous avons constaté une diminution de la durée comprise entre le moment du prélèvement et le moment où l’hémoculture se positive dans l’automate. Cela concerne à la fois la période de jour et la période de garde. En journée, le gain médian est d’environ 3 heures. En période de garde, le gain est nettement plus important, avec une réduction médiane d’environ 8 heures. Les pneumocoques et les streptocoques bêta-hémolytiques se positivent le plus rvite. Le délai de positivité dans l’automate est significativement plus court pour E.coli et les autres entérobactéries.

Des indicateurs qualité disponibles grâce au « concentrateur » de données MYLA®

L’utilisation du serveur MYLA® permet d’établir des rapports statistiques et de suivre plusieurs indicateurs qualité : taux de positivité par cellule, nombres de bactériémies, volume de remplissage par hémoculture et par épisode, taux de contamination (en lien avec le SIL), volume d’hémocultures solitaires… Des rapports personnalisés, hebdomadaires, mensuels, trimestriels, peuvent être envoyés aux cliniciens

Éducation des services sur les bonnes pratiques de prélèvement des hémocultures

Exemple de la « Pocket card »
bioMérieux propose une offre complète de services pour sensibiliser les préleveurs aux bonnes pratiques de prélèvements des hémocultures. Parmi ces services, les « Pocket cards », dispositif plastifié et personnalisé, offrent une synthèse des bonnes pratiques liées à ce prélèvement critique : nombre de flacons, ordre des flacons et des tubes, volume optimal de sang, bon positionnement de l’étiquette patient.

Optimisation de l’ensemble du workflow des hémocultures depuis le prélèvement jusqu’à l’antibiogramme

Pour optimiser le workflow dans la prise en charge des hémocultures positives, l’accent est mis sur l’identification du pathogène, l’obtention rapide de l’antibiogramme et des tests complémentaires phénotypiques. La phase initiale de mise en culture et de détection rapide reste essentielle, d’où l’importance du nombre d’hémocultures prélevées, du délai de chargement et de leurs prises en charge 24 heures sur 24.

Remerciements

Remerciements à toute l’équipe du laboratoire de bactériologie de l’hôpital Lariboisière, et plus particulièrement aux techniciens des équipes de jour et de nuit sans lesquels ce travail n’aurait pas été possible.

(*) versus l’ancien système

Contact laboratoire : Dr Gauthier PÉAN DE PONFILLY – gauthier.pean-de-ponfilly@aphp.fr

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