Le management hospitalier doit actuellement accompagner un processus de profondes mutations. En effet, la mue vers l’hôpital de demain implique de nombreuses remises en question, y compris de la part des plus hautes sphères dirigeantes, dans leurs interactions avec les personnels ainsi qu’avec leurs homologues.
Le rapprochement et la fusion des équipes ont déjà abouti à la création de groupements hospitaliers de territoire (GHT), structures nouvellement créées pour optimiser et améliorer l’accès aux soins en favorisant une meilleure coordination entre les différents établissements.
Le nombre de patients en hausse et celui du personnel sur une pente descendante, voilà quelques-uns des défis auxquels les dirigeants hospitaliers sont actuellement confrontés.
Le recours aux nouvelles technologies, notamment à l’intelligence artificielle, pour l’automatisation de certains processus de terrain devrait toutefois assurer à l’avenir un meilleur contrôle des opérations ainsi qu’une gestion des ressources plus adaptée.
L’évolution du milieu hospitalier
Les personnels de santé des établissements hospitaliers sont sans cesse appelés à s’adapter au changement, ce qui est un facteur de tension impactant sur leur qualité de vie au travail.
Les restrictions financières occasionnent une surcharge de travail tout comme un stress supplémentaire : le personnel a l’impression de toujours devoir faire plus avec moins. Peu reconnu et peu valorisé, il ressent le besoin d’être mieux encadré sur le terrain.
Même si nous manquons de données chiffrées fiables dans ce domaine, nous savons tout de même que le nombre moyen d’années d’activité des personnels infirmiers est faible et qu’ils sont nombreux à choisir une autre orientation professionnelle après moins d’une dizaine d’années de carrière. Il paraît important d’employer les grands moyens pour inverser la tendance.
Les rapprochements territoriaux entre établissements viennent s’ajouter aux transformations en cours. En 2016, la loi de modernisation du système de santé donne naissance à des groupements hospitaliers de territoire. Il existe désormais 135 GHT dont le but est de remettre le patient au centre du système de santé.
Il s’agit néanmoins d’un défi supplémentaire pour le management des hôpitaux qui, pour s’adapter à ce nouvel environnement, doit impérativement moderniser ses services en les équipant de nouvelles technologies en matière d’échanges de données, notamment.
Vers un changement managérial dans les hôpitaux
Le rôle essentiel des managers
Les managers sont en première ligne dans l’échelle des responsabilités pour appliquer les changements nécessaires aux hôpitaux. Comme dans toute entreprise de services, de la qualité du management dépendent au final la motivation des équipes et la qualité des services rendus.
Dans un article du magazine Forbes de Patrick De Coster et Ariane Bouzette intitulé « Le management hospitalier doit se transformer » datant de novembre 2019, il était déjà question de la nécessité pour les équipes managériales de ressouder les liens avec leurs bases et de se reconnecter avec les réalités du terrain.
Selon eux, il est primordial que les hôpitaux s’inspirent des techniques des entreprises pour motiver leurs forces vives : « Cette culture d’entreprise est fondée sur des valeurs fortes telles que le respect, le travail en équipe, la confiance mutuelle, réellement vécues au quotidien par tous (…) ».
Cela n’en n’est devenu que plus pertinent aujourd’hui, à la suite de la crise sans précédent apparue au cours de la pandémie de Covid-19.
L’implication des équipes, vecteur essentiel pour une évolution réussie des pratiques professionnelles à l’hôpital
Plusieurs techniques de management peuvent être mises en place pour gérer les équipes de façon plus raisonnée.
Évoquons par exemple la planification participative, laquelle consiste pour les équipes à se fixer des objectifs communs sur une durée définie.
Par extension, grâce au management participatif, les managers insufflent des nouvelles énergies aux équipes concernées en déléguant une partie de leurs missions.
Le « management agile » est une autre forme d’innovation qui peut idéalement s’appliquer à la gestion des hôpitaux, en faisant se rencontrer les différents acteurs de terrain sur une base quotidienne si cela est possible. Ces échanges d’informations suscitent une meilleure implication et renforcent la capacité d’adaptation aux changements.
L’importance de l’accompagnement des professionnels de santé à l’automatisation
L’automatisation de laboratoires de microbiologie instaure de véritables changements durables au sein des équipes, ce processus les aidant à mieux gérer les flux de travail et les pics d’activités tout en rationnalisant leurs tâches – d’où la réduction des délais dans le rendu des résultats.
Un outil de management précieux est aussi de confier au fournisseur de solution d’automatisation, l’accompagnement des équipes dans la prise en main du changement technologique. Ces ateliers ont pour vocation de préparer l’arrivée de la nouvelle technologie, de fédérer les équipes et de les embarquer sur le projet en leur permettant de laisser de côté les craintes, pour s’investir durablement vers l’avenir.
Ainsi, les immenses progrès de l’intelligence artificielle ont rendu possible l’aménagement de laboratoires avec des plateformes de bactériologie de dernière génération.
L’automatisation totale de la microbiologie a effectivement impacté de manière positive les tâches du personnel. Dans certains établissements, les techniciens ont d’abord été assez frileux face à ce nouveau système : « Aura-t-on encore besoin de nous ? ».
Mais dans les faits, ils ont dû se rendre à l’évidence en constatant qu’au contraire, l’automatisation des tâches leur permettait de se concentrer sur des processus non mécaniques mais essentiels.
Cette automatisation peut donner la possibilité de se concentrer sur l’expertise des prélèvements complexes et précieux.
Si les patients ont besoin d’un diagnostic rapide et fiable, cela implique pour les laboratoires de microbiologie de devoir résoudre des pannes matérielles dans les meilleurs délais.
La réalité augmentée est très utile dans ce cas, elle permet aux experts d’être présents « virtuellement » pour guider les techniciens sur place dans la réparation des éléments défectueux. Les tests ont montré qu’en faisant l’économie du déplacement sur le terrain d’un technicien spécialisé, le gain de temps est substantiel pour un résultat identique.
L’intelligence artificielle est désormais au cœur des laboratoires de microbiologie des hôpitaux Saint-Louis et Lariboisière-Fernand-Widal (Assistance Publique – Hôpitaux de Paris).
Mis en place en juin 2020 à Saint-Louis, les deux ensemenceurs automatiques WASP et les deux étuves intelligentes qui s’y trouvent traitent les quelques 800 échantillons quotidiens à analyser.
Outre la rapidité assurée pour l’obtention des résultats, la sécurité des opérateurs est renforcée grâce à un système d’intelligence artificielle embarqué baptisé PhénoMATRIX™. Les algorithmes identifient et interprètent les cultures par reconnaissance d’images et comparaison avec les modèles des bases de données disponibles.
Le Pr Béatrice Berçot, biologiste médicale au sein des AP-HP, précise que l’intelligence artificielle est aussi un moyen pour le service de soins de communiquer avec les biologistes, ce qui facilite une meilleure validation du diagnostic en fonction des données spécifiques à chaque patient.
L’intelligence artificielle, pour fonctionner correctement, a besoin d’accéder à de grandes bases de données. Un des aspects préoccupant pour la santé humaine étant actuellement la résistance aux antibiotiques, des solutions logicielles ont été lancées pour centraliser les bases de connaissances. Citons par exemple le logiciel APSS (Antimicrobial Prescription Surveillance System), qui permet un diagnostic connecté intégrant l’antibiogouvernance.
Le management hospitalier n’est donc pas démuni face aux défis majeurs actuels. En préparant mieux les équipes aux étapes de la révolution numérique, les managers des hôpitaux ont ainsi la capacité de mettre en avant les innovations technologiques en les combinant avec des approches de management plus proactives.
L’harmonie pourra ainsi revenir au sein des professionnels de santé, qui éprouveront plus de satisfaction au travail, alors que toutes les entités (laboratoires, hôpitaux, services logistiques) échangeront plus vite et précisément les données numériques entre elles, de manière automatisée à chaque fois que cela sera possible.