Le 13 avril 2021, la Société Française d’Anesthésie et de Réanimation (SFAR) a organisé un e-symposium dédié à l’insuffisance rénale aiguë (IRA). Cet événement a mis en lumière les problématiques liées à cette pathologie et ses impacts à court et long terme. Ce fût également l’occasion d’un partage d’expériences des experts et d’échanges sur les mesures néphroprotectrices.
« L’insuffisance rénale aiguë touche un patient sur deux en réanimation », a rappelé le Pr Alexandre Hertig, chef du service de néphrologie à l’hôpital Foch. La définition de cette pathologie a été stabilisée par l’organisation mondiale KDIGO (Kidney Disease: Improving Global Outcomes) en 2012. Elle identifie trois stades en fonction de la variation dans un temps court de la créatinine sérique et de la diurèse. « L’insuffisance rénale aiguë est un événement fréquent en réanimation et il existe un lien direct entre l’IRA et le risque de décès à l’hôpital, précise-t-il. »
Pas de traitement : le combat contre l’Insuffisance Rénale Aiguë repose sur les mesures préventives
« De nombreuses études ont été publiées ces dernières années pour clarifier l’indication de la dialyse : quand et comment l’initier ? On sait donc de mieux en mieux prendre en charge la partie symptomatique de l’IRA, pointe le clinicien. » En revanche, en 2021, il n’existe toujours pas de traitement curatif de l’insuffisance rénale aiguë.
Les médecins s’appuient alors sur le « bundle de soins », c’est-à-dire un ensemble de mesures de soins néphroprotecteurs. Le groupe KDIGO recommande la mise en place de ces mesures dès que le patient est identifié à haut-risque d’insuffisance rénale aiguë, autrement dit avant l’apparition de la dysfonction rénale. Il s’agit essentiellement « d’éviter les traitements néphrotoxiques, d’optimiser l’hémodynamique et de normaliser la glycémie », indique Alexandre Hertig.
Les impacts à court et long terme de l’Insuffisance Rénale Aiguë
L’insuffisance rénale aiguë est un syndrome qui touche plus de 50% des patients de réanimation (1). La mortalité à court et à long terme augmente en fonctions du stade d’IRA. Et si la dysfonction rénale s’installe, le risque d’insuffisance rénale chronique est important, avec un lourd impact à moyen et long terme, notamment sur la plan cardiovasculaire. « Aujourd’hui près d’un patient sur deux sort de réanimation avec un débit de filtration diminué <60ml/min, précise-t-il. Et si cette diminution persiste 3 mois, le diagnostic d’Insuffisance rénale chronique peut être posé. »
De plus, même si la plupart des patients de réanimation présentent une IRA transitoire, c’est-à-dire qu’ils retrouvent des paramètres normaux de fonction rénale (créatinine et diurèse) à la sortie de l’hôpital, des données récentes ont montré que le pronostic rénal reste impacté à long terme : « Quand un patient sort vivant de réanimation après un épisode d’IRA, le sur-risque de dépendre d’une dialyse chronique à 10 ans est d’environ 15 % ; soit 1 patient sur 6, c’est majeur ! » précise Alexandre Hertig, d’après une étude (2) sur le devenir de 6 000 patients de chirurgie cardiaque ayant présenté un épisode d’IRA.
Ce constat a ainsi fait émerger récemment la notion de « maladaptive repair », qui traduit « une mauvaise réparation [du tissu rénal] au long court, avec l’installation d’une fibrose interstitielle et d’un phénotype d’insuffisance rénale chronique. » L’insuffisance rénale chronique accroît donc aussi le risque d’événements cardio-vasculaires. « Après un épisode d’IRA, il est très important que les patients soient revus par un néphrologue et un cardiologue, car une surmortalité les menace » recommande Alexandre Hertig.
La clé : un diagnostic précoce
La créatinine est un paramètre largement utilisé pour diagnostiquer l’insuffisance rénale aiguë, mais «c’est un marqueur tardif. On attend de nouveaux marqueurs », indique Alexandre Hertig. Quant au critère de diurèse, son interprétation est très compliquée en réanimation. « L’oligurie n’est pas spécifique de l’atteinte rénale, confirme le docteur Alessandra Martinelli, réanimatrice à l’hôpital Papa Giovanni XXIII à Bergame, en Italie. Et pour définir l’oligurie selon les critères KDIGO, on doit attendre au moins six heures. ».
Le test NEPHROCHECK permet de détecter l’agression rénale en dosant deux biomarqueurs précoces et spécifiques de l’IRA. « Je pense que NEPHROCHECK® nous donne la possibilité d’intervenir quand l’atteinte rénale est encore réversible, partage Alessandra Martinelli. Il est plus précoce que les autres marqueurs : la créatininémie ou l’oligurie. On peut intervenir plus tôt, appliquer le bundle de soins protecteurs et personnaliser la prise en charge des patients. »
« Quand un patient sort vivant de réanimation après un épisode d’IRA, le sur-risque de dépendre d’une dialyse chronique à 10 ans est d’environ 15% ; soit 1 patient sur 6, c’est majeur ! »
précise Alexandre Hertig
« Je pense que NEPHROCHECK® nous donne la possibilité d’intervenir quand l’atteinte rénale est encore réversible. Il est plus précoce que les autres marqueurs : la créatinine ou l’oligurie. On peut intervenir plus tôt, appliquer le bundle de soins protecteurs et personnaliser la prise en charge des patients.»
partage Alessandra Martinelli
La physiologie de l’Insuffisance Rénale Aiguë en réanimation
Dans la majorité des cas, l’IRA est le résultat d’une nécrose du tubule proximal, un segment du néphron très peu vascularisé et oxygéné. La pression partielle en oxygène (PaO2) y est estimée entre 20 à 30 mm Hg, elle est donc très sensible à la moindre agression, comme une hypotension, une hypovolémie, une ischémie ou un sepsis.
(1) Kellum JA, Sileanu FE, Murugan R, Lucko N, Shaw AD, Clermont G. Classifying AKI by Urine Output versus Serum Creatinine Level. J Am Soc Nephrol. 2015;26(9):2231-2238. doi:10.1681/ASN.2014070724
(2) David Legouis, Pierre Galichon, Aurélien Bataille, Sylvie Chevret, Sophie Provenchère, Anne Boutten, Dimitrios Buklas, Jean-Luc Fellahi, Jean-Luc Hanouz, Alexandre Hertig; Rapid Occurrence of Chronic Kidney Disease in Patients Experiencing Reversible Acute Kidney Injury after Cardiac Surgery. Anesthesiology 2017; 126:39–46 doi: https://doi.org/10.1097/ALN.0000000000001400.