Echos du plateau technique du CHU de Bordeaux à propos d’une solution de diagnostic du SARS-COV-2 associant les trousses ARGENE® et l’automate MGI SP-960
Interview avec le Dr Agnès Georges-Walryck, chef de pôle de Biologie et de Pathologie, et le Pr Marie-Edith Lafon, chef de service de Virologie et le Dr Pantxika Bellecave, biologiste au CHU de Bordeaux.
Le laboratoire de virologie du CHU de Bordeaux est inséré au sein d’un plateau technique de biologie moléculaire sur lequel sont partagées les techniques de virologie, de bactériologie, de parasitologie et de mycologie. Lors du premier déconfinement, le pôle de Biologie et Pathologie auquel appartient le laboratoire qui a mis en place sur une nouvelle plateforme technique dédiée une solution mixte de diagnostic du SARS-CoV-2, avec une machine d’extraction chinoise MGI SP-960, des trousses de réactifs ARGENE® et des thermocycleurs CFX de Bio-Rad.
11 mars 2020, l’épidémie de Covid-19 est déclarée par l’OMS, le CHU de Bordeaux se met en ordre de marche.
Très rapidement, les premiers tests diagnostiques sont mis en place dans les CHU.
« Dans le contexte d’urgence, nous avons bénéficié de la technique mise au point par le Centre national de référence. C’était très bien pour commencer »
se souvient le Pr Marie-Edith Lafon, virologiste du CHU de Bordeaux.
Cependant la technique manuelle s’avère très coûteuse du fait du coût de l’enzyme à utiliser et le laboratoire avait besoin de plus d’automatisation. « Nous étions aussi très limités, car nous ne pouvions pas réaliser beaucoup de plaques par jour ». L’équipe se tourne alors très vite vers les premiers kits de réactifs marqués CE.
Avril 2020, le CHU de Bordeaux reçoit sa première machine d’extraction MGI SP-960
Le CHU de Bordeaux reçoit une machine d’extraction chinoise MGI SP-960, commandée par le Ministère français de la Santé à la société MGI issue du groupe chinois BGI (Beijing Genomics Institute). Alors inconnus, ces automates chinois à haut débit d’extraction des acides nucléiques devaient permettre de réaliser 2400 tests quotidiens en prévision du déconfinement.
L’ambition affichée pour la France était alors de parvenir à réaliser 700 000 tests virologiques de dépistage du SARS-CoV-2 par semaine, en équipant les 20 plus grands centres hospitaliers de machines à haute cadence.
Mais le processus diagnostique en aval de la machine restait à élaborer. « Une fois l’automate MGI réceptionné, la Direction générale de la Santé nous a proposé trois types de réactifs pour la PCR SARS-CoV-2 : les réactifs chinois BGI associés à l’automate d’extraction MGI, le kit Thermo Fisher, et les réactifs ARGENE® bioMérieux » se souvient le Dr Pantxika Bellecave, ingénieure au CHU de Bordeaux.
« Le plateau technique n’étant pas équipé de thermocycleurs Applied Biosystems compatibles avec les kits Thermo Fisher, on a donc orienté notre choix vers les kits de bioMérieux”
précise le Dr Pantxika Bellecave, ingénieure au CHU de Bordeaux
Le choix de l’équipe du CHU de Bordeaux se porte sur les kits bioMérieux.
« Nous avons testé en parallèle les kits chinois BGI et les kits bioMérieux, et ces derniers fonctionnaient beaucoup mieux. Nous avions aussi une expérience d’utilisation des réactifs ARGENE®-bioMérieux (dilution de la RT, prémix) qui nous a rassurés dans ce contexte d’urgence ».
révèle le Dr Bellecave.
“Des kits ARGENE® de détection connus et fiables”
« La gestion d’une situation de crise et d’urgence est en effet bien différente de celle d’une situation de routine avec l’acquisition de nouvelles techniques pour des diagnostics que l’on maîtrise déjà », fait remarquer le Dr Agnès Georges-Walryck, chef du pôle Biologie et Pathologie du CHU de Bordeaux.
« Pour monter ce diagnostic du Sars-Cov-2, nous avions besoin à la fois d’avoir des techniques dont on sentait qu’elles étaient solides, ou en tous cas, consolidées. Et que les industriels avancent avec nous sur les questions qu’on pouvait se poser ».
Dr Agnès Georges-Walryck, chef du pôle Biologie et Pathologie du CHU de Bordeaux
Or, les kits de réactifs ARGENE® bioMérieux avaient déjà donné satisfaction au plateau de biologie moléculaire de Bordeaux sur des automates d’autres fournisseurs. Ils rassuraient donc l’équipe médico-technique du fait « de leur notoriété et de l’accompagnement déjà éprouvé de la part du fournisseur ».
“Plus de 250 000 tests SARS-CoV-2 réalisés depuis le 11 mai”
Ainsi, la mise en place des tests diagnostiques virologiques du SARS-CoV-2 en aval des machines chinoises MGI, s’est faite sans trop de difficulté. D’autant que 2 des 5 techniciens affectés initialement à cette nouvelle plateforme avaient une forte expérience avec les réactifs bioMérieux en virologie. « Sur la plateforme, depuis le 11 mai, nous avons déjà réalisé plus de 250 000 tests SARS-CoV-2 ! Alors même que l’activité de PCR CMV du laboratoire, qui est notre plus gros marqueur, est de l’ordre de 15 000 par an », s’exclame le Dr Lafon. Une volumétrie inégalée ! Il faut dire que tous les écouvillons nasopharyngés sont testés sur la plateforme, quelle que soit l’origine du patient. Ces chiffres qui laissent pantois, expliquent aisément la grande solidarité qui s’est manifestée entre collègues du pôle de biologie, et le rapprochement qui s’est créé entre biologistes et réanimateurs, infectiologues et urgentistes de la cellule de crise.
De leur côté, « les équipes bioMérieux se sont montrées également très réactives et performantes, assurant des livraisons échelonnées à partir de commandes conséquentes, sans aucune rupture, soutient le Dr Bellecave. Nos revendications en termes de conditionnement, ont par ailleurs également été prises en compte, les fournisseurs s’engageant à nous fournir des boîtes de réactifs moins volumineuses dans des délais réduits, afin qu’elles puissent être plus facilement stockées dans nos réfrigérateurs ».
Naturellement, des difficultés subsistent, notamment au sujet de l’interprétation des faibles charges virales. Mais là encore, les équipes bioMérieux se montrent à l’écoute et un forum des utilisateurs de la plateforme MGI a permis de partager la vision technique de personnes habituées à travailler sur les coronavirus. « Les industriels ont les mêmes difficultés que nous, et doivent s’adapter au jour le jour face aux nouvelles informations » , souligne le Dr Georges Walryck.
« J’en veux pour preuve les nouveaux variants qui apparaissent. Comment doit-on les gérer ? Qu’est-ce qu’on doit faire figurer comme commentaire dans les résultats que l’on rend, vis-à-vis des sensibilités qui sont très basses. Nous avons besoin de travailler main dans la main avec les industriels qui nous accompagnent et avancent en même temps que nous sur ces questions. »
Dr Georges Walryck
Une intégration réussie de la gamme ARGENE® depuis 2019 associée à une volonté du CHU de disposer d’un système ouvert pouvant intégrer différentes trousses
Retour en 2019. À cette époque, un appel d’offres conséquent est émis pour le plateau technique de biologie moléculaire du CHU de Bordeaux. Avec la volonté de disposer d’un système ouvert qui puisse intégrer les trousses de plusieurs fournisseurs pour toutes ses disciplines (virologie, bactériologie, parasitologie et mycologie).
« Nous avons opté pour des extractions en partie sur des MagnaPures 96 Roche autonomes, et en partie sur le système Roche Flow. Et pour des PCR sur des lightcyclers 480 Roche »
spécifie le Dr Lafon.
Quant aux réactifs, ce sont les trousses ARGENE® bioMérieux qui ont été sélectionnées par l’équipe pour le suivi de transplantation et la recherche des virus CMV, EBV, Herpes-6, Adénovirus, BKV, Herpès virus 1 et 2, VZV, et parvovirus B-19. Après quelques tests effectués par le Dr Bellecave, l’équipe de biologie médicale, convaincue par les premières trousses, étend ses tests de dépistage en février 2020, aux grippes A et B, au virus respiratoire syncytial VRS et au métapneumovirus, avec les kits de réactifs du même fournisseur. Et l’hiver dernier, les pratiques du laboratoire de biologie médicale s’étendent encore aux trousses de réactifs ARGENE®-bioMérieux des rhino-, entéro- para-influenza- et corona- virus. « Actuellement, nous utilisons presque la totalité de ce que propose la société ARGENE® en therme de kits. Et tous ces marqueurs nous donnent entière satisfaction », souligne le Pr Lafon.
Au-delà de leurs performances, le fait que ces trousses puissent s’intégrer dans un système ouvert comme celui de Roche était un point crucial pour le laboratoire bordelais.
“Une aide colossale dans la démarche d’accréditation”
Ce changement d’automates et de réactifs d’avril 2019 se devait d’être réussi. Car une visite du Cofrac était prévue en juin 2019. « Il fallait que ça marche très vite. Il y avait une urgence réelle à tout mettre en place. Toute l’équipe s’est mise à travailler dessus et ça a marché », se réjouit le Dr Lafon. En juin, la PCR CMV sang total ARGENE®-bioMérieux sur les automates Roche a été accréditée. « Tous les réactifs étaient marqués CE et cela a été une aide colossale pour entrer dans la démarche d’accréditation en portée A. Également le fait que la notice de ces trousses précise leur utilisation possible sur des automates Roche. L’équipe compte désormais accréditer petit à petit, les tests de dépistage des adénovirus, d’HHB6, d’EBV, de BKV et puis passer à ceux concernant HSV et VZV. »
« Nous procédons par étapes car c’est un processus d’accréditation selon le SH Form 06 du Cofrac, avec, à chaque fois, des tests de répétabilité, de reproductibilité, etc. »
mentionne le Dr Lafon
Outre leurs bonnes sensibilité et spécificité, l’équipe biologique a aussi apprécié qu’il n’y ait qu’un seul contrôle interne commun à toutes les cibles. « Cela nous a beaucoup simplifié la vie en fait. Pour une extraction ou un prélèvement, on aura toujours le même contrôle interne », indique le Dr Bellecave.
L’épidémie continue … quelle stratégie de positionnement anticipez-vous pour les mois à venir ?
Pour l’heure, l’existence de la plateforme de dépistage du SARS-CoV-2, conçue pour 18 mois, n’est pas remise en cause. « Nous entrons dans une nouvelle ère, déclare le Dr Georges-Walryck. Pour l’instant, la vaccination est réservée, priorisée. De nombreuses personnes devront bénéficier de dépistages. Je n’imagine pas que cette durée de 18 mois ne soit pas repoussée. D’autant que nous avons fait évoluer cette plateforme ». En termes de fonctionnement, le laboratoire de biologie du CHU de Bordeaux a introduit sur cette plateforme de dépistage des PCR d’autres agents recherchés lors des périodes hivernales, et notamment, la grippe et le VRS. « L’idée de regrouper des analyses qui sont demandées sur un même prélèvement, est plus judicieux pour la prise en charge des patients et permet d’économiser des écouvillons en évitant d’avoir un doublon de prélèvement nasopharyngé pour faire la grippe d’un côté, et le SARS-CoV-2 de l’autre. Ce qui procure aussi un certain confort aux patients », évoque le Dr Bellecave.
Si la plateforme fonctionne correctement sur écouvillons pour les tests PCR, l’introduction des tests salivaires imposera sans doute un pré-traitement susceptible d’ajouter de la complexité au process des échantillons. Pour l’heure, le laboratoire reste en attente des consignes de la Haute Autorité de Santé et de la Société française de microbiologie à ce sujet.